Action-réactions
Pour une réflexion sur la place de l'Aïkido dans la société moderne

Ce petit texte, concocté par Jean-François Douche, est paru dans AIKIDO MAGAZINE n°6 de juillet, août et septembre 1985. Plus que jamais d'actualité, il nous conforte à mener notre action.
Comme il est de règle dans tout art traditionnel, O Sensei n'a laissé qu'un enseignement de Maître à disciple et en dehors de quelques conférences aucune «bible» ne peut servir de référence au pratiquant qui s'engage maintenant dans la voie de l'aïkido. Les principaux disciples du Maître, qui constituent en quelque sorte la deuxième génération de l'aïkido, sont eux-mêmes en passe d'atteindre un âge respectable et ce n'est pas leur faire injure que d'envisager d'un oeil lucide leur fin plus ou moins prochaine. Le développement de l'aïkido ne date que d'environ trente cinq ans et en moins d'un demi-siècle de nombreux événements sont survenus modifiant la physionomie de notre discipline. L'aïkido est en passe de devenir une discipline de «masse», en ce sens qu'avec plus de 500.000 personnes de par le monde, nous sommes loin de la petite école Ueshiba Aïki-jutsu qui s'était ouverte en 1931 dans la banlieue de Tokyo. De plus en sortant du Japon, l'aïkido doit affronter un univers culturel totalement différent, susceptible de lui apporter un enrichissement mais également de le réduire à une simple pratique physique. Pour toutes ces raisons, il est sûr que les prochaines décennies seront capitales pour l'aïkido.
Pour certains le salut consiste à tenter de suivre le système traditionnel des écoles d'arts martiaux en conservant une transmission orale de Maître à disciple. Cette conception est utopique et dangereuse car elle fait fi de la réalité. Une transmission directe de Maître à élève n'est possible que dans le cadre d'une discipline à caractère confidentielle. Les secrets du Jyu-jitsu n'étaient autrefois enseignés qu'à quelques élèves à la fois qui investiraient toute leur vie pour recueillir l'intégralité de l'héritage culturel de l'école. Kuroiwa Sensei, un des Uchi deshi de O Sensei, utilise souvent cette image. O Sensei était un éléphant ; chacun de ses élèves croît par l'enseignement qu'il a reçu embrasser l'animal tout entier. En fait l'un ne tient que sa patte, l'autre que l'oreille. Si l'on prolonge cette image dans quelques années, les élèves ne tiendront plus que la jambe du Maître, qui tient la patte de l'éléphant.
Seul un profond travail de réflexion et de mise en commun de nos expériences peut éviter un appauvrissement progressif de l'aïkido. Ce n'est qu'en confrontant nos expériences que nous pourrons empêcher que l'aïkido se dilue dans une pratique inconsistante. Il ne s'agit pas non plus de créer un évangile et de borner les limites de notre pratique mais au contraire de permettre à chacun de regarder plus loin. (...)
J.F. Douche
AIKIDO MAGAZINE n°6
juillet, août, septembre 1985

AIKIDO MAGAZINE n°6
juillet, aout,
septembre 1985
édité par l'AIA
(Association
de l'Information
de l'Aikido)
Dépot légal :
3ème trimestre 1985


Merci encore à la Fédération Française d'Aikido, Aikibudo et Affinitaires, à toute la rédaction d'Aikido Magazine, et particulièrement à Jean-François Douche, auteur du texte, pour leurs autorisations à reprendre cet article .
Merci enfin à Marc pour son aide à la saisie de ce texte.


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